Retour sur... le festival Scopitone 2021 (3/3)

Par L'équipe Mallapixels
Val de Marne
22 septembre 2021
Journée Hacnum: "Quelles politiques culturelles pour le numérique?"

Dans le cadre de Scopitone 2021, une journée professionnelle était organisée par le réseau Hacnum, qui réunit de nombreuses structures de production et de diffusion des arts numériques en France.

La thématique faisait se croiser deux problématiques complémentaires :

-          Les politiques publiques en matière d’arts et de création numérique ;
-          L’impact du numérique sur les politiques culturelles.

Une première table ronde intitulée « Des Espaces Culture Multimédia à une politique culturelle du numérique : relecture de 30 ans de politique culturelle et numérique » réunissait Eli Commins, nouveau directeur du Lieu unique à Nantes, Géraldine Farage, directrice du Pôle pixel à Villeurbanne (et ex-directrice du Shadok à Strasbourg), Emmanuel Vergès, co-directeur de l’Observatoire des politiques culturelles et Céline Berthoumieux, directrice de Zinc à Marseille (et présidente de Hacnum).

Emmanuel Vergès dresse une rapide histoire des politiques culturelles de l’Etat en matière numérique. Une première période était concentrée sur l’accompagnement à l’équipement de lieu. Une seconde, toujours en cours, travaille sur l’offre, avec notamment des dispositifs d’accompagnement des artistes (Dicréam, Chimères…).

Désormais toute politique de dématérialisation induit la nécessité de s’adosser à une politique sociale de lutte contre la fracture numérique pour assurer un égal accès aux droits de tous les citoyens. Il y a nécessité à penser comment assurer l’accessibilité des droits culturels pour toute politique de dématérialisation.

Il est de même nécessaire d’opérer une réarticulation des offres dans les lieux culturels et les territoires en prenant en compte l’offre publique et privée de contenus en ligne.

Eli Commins évoque quant à lui la difficulté pour les responsables politiques de penser une politique culturelle en matière de numérique, principalement du fait que le numérique induit nécessairement une porosité entre les domaines de l’intervention publique.

Les initiatives viennent souvent d’« en bas », du terrain et des techniciens. Le portage politique est souvent encore trop lacunaire.

Un élément important à ses yeux : éviter de mettre les arts numériques dans une niche, difficile à appréhender pour le public et les responsables politiques. Il préfère pour sa part parler de « culture contemporaine », terme beaucoup plus ouvert et transversal, qui inclut les questions du numérique par ailleurs désormais incontournables dans l’ensemble des champs artistiques.

Géraldine Farage nuance ce propos, en soulignant qu’il est cependant nécessaire de reconnaître certains métiers spécifiques liés au numérique artistique, afin qu’ils puissent être rémunérés et bénéficier d’aides publiques.

 
Une seconde table-ronde était intitulée « Regards d’acteurs et actrices des politiques publiques culturelles ». Elle réunissait Christophe Bennet, président de la FNADAC, Elisabetta Pomiato, coordinatrice des politiques en faveur de la création artistique au Ministère de la Culture, Guylaine Hass, Chargée de projets cinéma, audiovisuel et numérique à la Région des Pays-de-la-Loire, et René Phalippou, Responsable du Pôle « Création, industries culturelles et action culturelle et territoriale » à la DRAC Pays-de-la-Loire.

Les intervenants se sont attachés à identifier certains enjeux actuels des politiques publiques culturelles en matière numérique.

Un premier enjeu est de trouver des formats pertinents pour accompagner les artistes dans la durée. Le principal mode d’intervention actuel, l’appel à projets, s’il fonctionne globalement bien, ne rencontre pas toujours les besoins et modes de travail des artistes, et ne permet pas une action dans la durée. Par ailleurs il demande des compétences spécifiques au sein des équipes artistiques afin de répondre aux AAP, ce qui crée des inégalités d’accès.

Un autre enjeu est l’accompagnement des projets et structures en matière de fonctionnement, et pas seulement en investissement. Les micro-folies apportent un éclairage intéressant sur ce point : dans un premier temps, l’aide de l’Etat était quasi-exclusivement de l’investissement, d’où de nombreuses micro-folies « coquilles-vides », les municipalités n’ayant parfois pas les moyens humains pour proposer des offres de qualité dans la durée. Actuellement le dispositif évolue, avec la proposition d’emplois aidés au sein des équipes des micro-folies.

Un troisième enjeu est le montant des aides à destination des artistes « numériques ». Ces aides sont jugées trop modestes pour pouvoir accompagner des artistes souhaitant opérer un « passage à l’échelle » et développer des propositions plus ambitieuses (ex : Adrien M…).

L’égalité d’accès des territoires aux propositions culturelles numériques est également posée (actuellement : fracture métropoles / milieu rural).

Il est également nécessaire de prendre en compte le fort développement des pratiques amateurs en ligne.

Enfin, l’artiste Anne-Sarah Le Meur - présente dans l’assistance - souligne la nécessité de penser la conservation et la restauration des œuvres numériques.

Christophe Bennet identifie trois leviers pour pérenniser les politiques culturelles en général, et numériques en particulier :

-          La nécessité de mutualiser la prise en charge budgétaire des actions entre plusieurs secteurs de l’intervention d’une collectivité (ex : projet EAC : financements avec services culturels, éducatifs, sociaux…)
-          La nécessite de fédérer plusieurs acteurs publics et collectivités autour de projets forts sur un territoire commun

Développer des co-financements avec le secteur privé (notamment via des incitations de type défiscalisation), permettant entre-autre de faire rentrer des œuvres dans les entreprises.


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